De la plaine à la montagne

Publié le par Michèle Pontier-Bianco

De la plaine à la montagne

Texte de A. Bianco

Après la mer, la montagne était inscrite au programme de la tournée. Rien ne devait nous décevoir au cours du périple le long des berges verdoyantes de la Soummam qui est serrée entre les montagnes, au pays de la vigne et surtout de l'olivier. 

Une route admirable, bordée de grands arbres, s'enfonce dans la vallée au travers des immenses vignobles d'El-Kseur et d'Oued Amizour. Elle passe, un peu avant El-Kseur, devant " Le Tombeau de la Neige " dans son cadre attristé de noirs cyprès.

El-Kseur - Le nom vient de " Ksar " = Palais ou Village fortifié

El-Kseur - Le nom vient de " Ksar " = Palais ou Village fortifié

Pendant toute une semaine notre mission allait nous conduire dans les petits villages de cette plaine alluviale de la Soummam dont la rivière fait toute la richesse et la fertilité. 

Mais une réelle impatience nous tenait, en attendant de découvrir dans la montagne, le bordj d'Adékar-Kebouche. Sur une vingtaine de kilomètres à peine, la route, taillée à flanc de montagne, après moult virages dans les ravins encaissés et tapissés d'un maquis abondant, s'élève rapidement, à hauteur d'une vaste clairière de prairies, à plus de 900 m. d'altitude. Tout autour s'étendent d'immenses forêts. Celle d'Akfadou est remarquable par ses cèdres et son fameux " Lac Noir " .

Lac Noir - ( Actuellement les cèdres seraient en péril ... )

Lac Noir - ( Actuellement les cèdres seraient en péril ... )

Un site admirable de hautes montagnes coupées de ravins insondables, de vallées encaissées profondément, s'étend à l'infini comme un océan vert sombre qu'agiteraient des vagues monstrueuses figées dans l'immobilité ; certaines échancrures permettent d'apercevoir la mer bleue et calme.

Transplantés brusquement à haute altitude,  nous sommes saisis par le froid de l'hiver approchant ; l'air vif de la montagne nous coupe les oreilles. Le soleil perce de temps en temps les nuages qui, s'accrochant aux sommets, se traînent en nappes de brume humide noyant tout de leur grisaille.

Autour du Bordj de la Commune Mixte, règne une activité de marché ou de foire ; d'innombrables petits ânes bruns et des mulets sont à l'attache et broutent paisiblement en attendant l'heure de ramener leurs cavaliers dans les petits douars perdus dans les djebels. 

Ce sont des conscrits pour la plupart, mais aussi des caïds, des " K'bars " responsables des files de ces jeunes gens qui attendent debout ou assis suivant l'urgence de leur passage devant la Commission Médicale du Conseil de Révision. 

Le flot humain s'écoule lentement. Le dernier homme reçoit la bénédiction générale. Cela met fin à notre court séjour en montagne, à une époque de l'année réellement mal choisie. Le retour est une fuite vers le fond de la vallée, à la recherche du soleil qui n'a pas abdiqué. 

Sidi-Aïch

Sidi-Aïch

Dès lors, notre course vers le sud voit la vallée se resserrer insensiblement ; la pente se raidit, nous " remontons " la rivière en la côtoyant. Nous traversons des villages aux jardins entourés de cactus géants où poussent en abondance des figuiers.

Les versants montagneux deviennent le domaine de l'olivier dont la culture est poussée intensivement dans toute la région, tandis que les fonds plats des vallées sont voués aux céréales. Mais, bien de pentes, bien des sommets apparaissent dénudés, creusés de ravinements découvrant l'ocre rouge de la terre argileuse ; ils annoncent déjà les paysages sauvages et stériles du massif des Bibans.

Sidi-Aïch. Dominant le village à plus de cent mètres, les bâtiments de la Commune Mixte, accrochés aux pentes, disparaissent dans les jardins, les fleurs et les feuillages. Un temps splendide colore brillamment la vallée au fond de laquelle serpente la rivière parmi de grands bancs de sable ou de cailloux roulés. Quelques palmiers dressent leur lourde chevelure sombre dans la lumière dorée. Un pont de fer, un viaduc, enjambe le cours d'eau et mène aux nappes vertes des jardins et vergers de l'autre rive ...

                                                            A. B. 

23 à 25-08-19

A suivre : Parenthèse bienvenue

Note

Qui lit encore de nos jours : " Le berger d'Akfadou - Roman Kabyle " de Ferdinand Duchêne  - paru en 1 928 ?

                                                M. P. B. 

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