Légendes et réalités -2 - Hammam Meskoutine
Texte de Albert Bianco
Seconde édition - des images et des notes en plus
Hammam Meskoutine, à quelques kilomètres de Guelma, mais loin de la grand-route, présente un caractère d'immensité reposante. C'est à peine si les trains qui stoppent à la station voisine, y mettent un peu d'animation fugace, un peu de bruit de ferraille passager.
Imaginez, noyé dans des champs d'oliviers et de céréales, un parc immense rempli de grands arbres centenaires, d'orangers, de citronniers et de massifs de verdure cachant l'unique hôtel, les escaliers, les paliers, les chemins, le bâtiment tout blanc abritant les installations thermales ; et puis, un grand plateau nu, éclatant de blancheur vomissant de partout des eaux bouillantes.
Plus de dix sources amènent à la surface du sol près de 1500 litres d'eau à la seconde ; de l'eau à 95o , extrêmement chargée de carbonates. Se déposant en boues blanchâtres, ils ont constitué tout le plateau et la falaise de déversement surplombant la riante vallée de l'Oued Bou Hamdane. La plus grande partie des eaux a été captée et canalisée pour les besoins des multiples installations thermales, thérapeutiques, sanitaires et même pour le chauffage central de l'hôtel. Le reste va se déverser à " La Grande Cascade " toute blanche, tachée de rouille par une multitude de ruisselets. Ils sont créateurs d'une infinie variété de formes pétrifiées : fines stalactites, colonnades torses, vasques minuscules accrochées aux parois, corniches modelées et larges pans calcaires boursouflés d'où s'élèvent des volutes, des panaches et des nappes de vapeur brûlante.
En arrière du plateau, dans l'herbe drue et les buissons, des groupes de cônes rocheux s'élèvent à la hauteur d'hommes debout ou accroupis . La légende qui a donné à Hammam Meskoutine le nom de " Bain des Maudits " s'est basée sur leur présence étrange.
On raconte, en effet " qu'au soir d'une noce, par groupes de deux ou trois, les invités s'apprêtaient à déguster le plantureux couscous offert et qui marque tous les festins musulmans. Or, il se trouvait que les futurs époux étaient frère et soeur et personne ne l'ignorait. Dieu, irrité par l'inceste qui allait se commettre, lança sa malédiction sur toute la noce, et, frappant sans distinction époux, parents et invités, changea chacun en bloc de pierre ...
En réalité, on peut supposer qu'autrefois, les sources s'ouvraient aux endroits-mêmes des blocs actuels, nés de la propriété pétrifiante des eaux, et que par suite de bouleversements, elles se sont déplacées. Les blocs, bases des stalagmites anciennes, sont maintenant passés dans la légende qui en a fait des maudits, des damnés pétrifiés par la main de Dieu.
Connu des Romains qui l'appelaient " Aquae Thibilitanae " , cet endroit présente de nombreuses traces de leur passage : des pierres nombreuses, des débris de statues et de sculptures ont été recueillis dans l'immenses parc de l'hôtel, en bas de la grande cascade, de l'autre côté de l'Oued. Et près de l'ancien hôtel vétuste et de bains maures, on voit encore les vestiges des piscines romaines.
Le grand parc de l'établissement est rempli de promenades et de coins charmants propices aux longues rêveries dans le grand calme de la nature, sous les frondaisons et les ramures des grands arbres, refuges de milliers d'oiseaux ; tel cet immense " thérébinthe " , énorme qui fait l'admiration des visiteurs. On y respire à pleins poumons, un air pur mêlé d'essences et de senteurs multiples, indéfinissables, mais tellement douces à sentir ...
A. Bianco
vitaminedz.com nous offre une photo très rare des ruines d'un établissement thermal Romain . De vraies ruines en effet ...
Notes de M.P.B.
HAMMAM MESKOUTINE : " Bain des damnés " ou " Bain de musc et d'argile " ? Vous choisirez l'une ou l'autre des ces traductions de l'Arabe ! D'autre part, les Romains l'appelaient " Aquae Thibilitanae, station thermale de Thibilis , ( Announa maintenant ) .
Hammam Debagh, de la wilaya de Guelma, est l'appellation actuelle, et Hammam Chellala serait le lieu de l'établissement thermal.
Le débit de l'eau est de 1650 litres par seconde.
La cascade de calcaire pétrifié s'étire sur un front de 400m et a 8m de hauteur.
Le lac souterrain qui alimente les 13 sources a été formé en 1878, après un glissement de terrain. Jean Sadeler, Maire de Clauzel ( auj. H. Boumédiene) , l'a découvert en 1883. L'entrée de la grotte qui mène au lac ressemble vaguement au sourire diabolique d'un démon - ( ce que me dit mon imagination ! ) .
J'ai trouvé une photo intitulée " Ruines d'un bain romain en Algérie " - ( MeisterDrucker ) - sans préciser le nom du lieu, mais je vous la présente car ces restes sont assez spectaculaires. (Si quelqu'un peut reconnaitre ce lieu ... ) .
Ce qui a fait le renom de Hammam Meskoutine, c'est la richesse de ses eaux. On dit qu'elles sont parmi "... les hyperthermales les plus minéralisées des oligo-métalliques ... " (sic) . Elles sont riches en carbonates, sulfates, chlorures, on y décèle des traces de fer, arsenic, acide sulfhydrique.
On comprend pourquoi cette station thermale continue à être célèbre et représenter un grand espoir pour les rhumatisants principalement, mais elles soignent aussi d'autres affections.
Pendant la pénible période du Corona Virus, la fréquentation avait chuté de ... 90 % !!! Elle a retrouvé ses curistes et ses touristes, heureusement.
Cependant quelque chose a changé : le tremblement de terre qui a touché la région de Guelma en Avril 2021, a causé un effondrement partiel de la célèbre cascade pétrifiée ... Elle est désormais comme ébréchée mais il faut bien s'habituer à ce nouvel aspect ... Rien n'est éternel (à part les diamants, on le sait) et la région a encore connu des secousses sismiques par la suite.
Hammam Meskoutine de nos mémoires continuera à attirer les admirateurs de son site et les malades qui placent en elle leur confiance.
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